L’écoute au service de l’identification des changements consommateurs et à leurs attentes et craintes
Il y a eu quelques changements de comportements liés aux craintes des consommateurs notamment sur les contacts physiques. 2 activités centrales online à noter : la livraison à domicile et le drive. Le drive a été la préoccupation principale avec une utilisation 7 à 8 fois supérieure en raison de l’absence de contact. L’écoute a également permis de réagir face à la difficulté d’absorption de la demande, avec des clients indiquant ce qui est bien ou non ou encore ce qu’il faut changer. C’était donc un point à surveiller avec beaucoup de minutie pour optimiser au mieux le service et réduire la souffrance des magasins face à cette demande gargantuesque.
Toujours en réponse aux craintes des consommateurs il fallait rassurer le client en mettant en avant les mesures d’hygiène. Il y avait un réel besoin de communiquer sur le paiement sans contact pour rassurer le client en lui permettant de les limiter le plus possible, toujours avec le peu de médias disponibles (radio et réseaux sociaux).
C’était un devoir citoyen pour Carrefour d’être aux services de ses clients, de faire attention au message donné. En définitive, le digital a explosé sur cette période, avec également une forte demande pour les magasins de proximité et à contrario une demande plus faible pour les grandes surfaces par peur du contact.
L’approche de Carrefour pour répondre aux angoisses consommateurs
Toujours dans la continuité des posts pour rassurer les consommateurs, il y a eu énormément de communication centrée sur le client et ses besoins. Étonnamment, lors des 3 premières semaines, la portée de la communication organique (nombre de personnes touchées par les posts non sponsoriés) sur les réseaux sociaux était très forte, ce qui est exceptionnel pour une marque. Les posts réalisés autour du vivre ensemble, en soutien aux hôpitaux, aux chauffeurs de poids lourds portaient très loin très rapidement. Plus le travail était dans la solidarité et le soutien sincère, plus les posts étaient partagés.
En termes de relation client, face à un afflux de demandes important sur les réseaux sociaux, 150 collaborateurs provenant plutôt des métiers (digital, marketing …) ont été mis à contribution pour être au téléphone, sur les réseaux sociaux et disponibles par mail pour répondre aux clients. Cela a permis de créer une réelle proximité avec les clients, un contact essentiel. Plus que jamais, la raison d’être de Carrefour était importante. Pour les employés cela a eu un impact avec des demandes concrètes et une proximité inhabituelle.
L’importance des médias sociaux pour répondre de manière rapide et efficace
Les réseaux sociaux ont été structurants pendant la crise. La veille et l’écoute sociale réorientées sur un tempo plus rapide ont permis de réagir avec agilité aux besoins et aux craintes des clients. Il faut se rappeler également que pendant les 3 premières semaines de la crise tout était incertain. Des sujets montaient ou descendaient au fil des déclarations (sur le confinement, le déconfinement, les horaires d’ouvertures …). L’écoute était essentielle, c’était l’écoute au service de la communication.
Pour réagir avec rapidité et efficacité, Carrefour a travaillé avec Publicis sur des sujets comme la création de templates simples pour répondre rapidement à toutes ces évolutions quotidiennes. Il fallait des templates pour faire passer des messages. La validation des templates a eu lieu dans les 15 premiers jours pour s’accorder sur les sujets de communication (les prix, les gestes barrières …). L’idée était d’avoir des templates thématiques pour Facebook, Instagram, YouTube et Twitter pour gagner une agilité.
Un autre rôle clé des réseaux sociaux pendant le confinement a été l’utilisation de la messagerie instantanée pour diffuser les catalogues qui étaient diffusés habituellement au format papier. Il fallait trouver le moyen de remplacer ces catalogues papier pour parler aux clients des promos. Pendant le Covid-19, les équipes de Carrefour ont mis en place des publicités sur Facebook pour mettre en avant les catalogues digitaux. Les clients intéressés étaient alors redirigés vers Messenger et recevaient le catalogue en PDF.
C’est un moyen important de distribuer un média essentiel pour les clients pour qui il n’y avait pas de distinction entre catalogue papier et digital. C’était également un mix de « Care », de promotion et de communication collaborateur. Il fallait, avec ce catalogue, rassurer les consommateurs sur la non-augmentation des prix et la présence des promotions, qui font partie intégrante de l’ADN de Carrefour.
Les enseignements à tirer de cette période pour Carrefour
La télé est redevenue un canal de communication tout comme les catalogues papiers. Cependant Carrefour va continuer à transmettre le catalogue digital notamment auprès des 70 000 clients hebdomadaires l’ayant consulté pendant le confinement afin de le pérenniser.
Autre changement déjà évoqué, mais la crise a permis à Carrefour de prendre conscience de l’importance des réseau sociaux pour communiquer avec le client. Toute nouvelle prise de parole est désormais diffusée sur les réseaux sociaux au même titre que la télévision. La progression fulgurante du digital est aussi un changement important avec de nouvelles interrogations comme la fidélisation, comment mieux optimiser les coûts sur les réseaux sociaux, comment attirer les clients en hypermarchés grâce à eux, comment continuer à générer du trafic ...
Il y a également un retour à la normale sur l’écoute sociale avec un tempo plus modéré dans les reportings. En revanche les éléments qui sont remontés pendant le confinement (manger local, les craintes sur l’augmentation des prix…) sont désormais des enjeux importants pour Carrefour et les grandes surfaces en général.
Concernant la consommation on constate plusieurs changements importants. Lors du confinement la consommation de denrées durables (riz, pâtes) ainsi que le papier toilette avait augmenté. En revanche, la consommation s’est repliée sur certains produits. Il est en effet plus compliqué de vendre les fruits et légumes, qui posent des questions RSE (emballages plastiques…). Les clients ont moins envie de faire du vrac. Les boucheries, poissonneries et les boulangeries sont également touchées, ce qui se répercute sur la filière agricole française, mettant tout une filière en difficulté. En revanche, les produits autour de la cuisine et le jardinage sont en hausse de consommation.
« Malgré l’absence de diffusion de catalogue papier pendant le confinement, nos clients souhaitaient continuer à s’informer sur nos promos. La digitalisation du catalogue dans les messageries instantanées nous a permis d’y répondre avec plusieurs centaines de milliers de catalogues digitaux distribués en quelques semaines. »
La « découverte » de la raison d’être de Carrefour (répondre aux besoins de ses clients, nourrir …) a été très structurante. La crise a cristallisé la raison d’être, c’est devenu extrêmement concret lorsque tous les employés se sont retrouvés mobilisés autour d’un objectif commun.
Une fois que la raison est trouvée, qu’elle s’impose naturellement (les écoutes sociales peuvent aider) c’est un élément fort qui va mobiliser les collaborateurs plus vite pour travailler ensemble. Cela a permis d’accélérer sur les sujets innovants comme le digital et les réseaux sociaux avec moins d’obstacles et de réticences. En résumé cela a permis d’accélérer positivement le changement, avec une raison concrète derrière le travail, de façon positive et bienveillante. Il faut également noter que la crise a créé une forme de repli sur soi avec notamment une peur de la crise financière. La question du prix sera donc essentielle et les marques auront un rôle à jouer.
Les impacts de la crise sur les marques et comment y répondre
Les impacts majeurs identifiés
Pour Nicolas André, Directeur du Planning Stratégique chez EPSILON France, il y a 3 grands impacts structurels qu’il a pu observer grâce à son travail sur les écoutes sociales et la data :
- Dans la continuité du témoignage de Thomas Rudelle, la crise du Covid-19 est avant tout une crise relationnelle. Elle impacte directement sur le principe de relation, et donc sur le logiciel marketing. C’est un changement majeur pour la transaction avec une explosion du e-commerce et une montée des canaux digitaux. A cette période il n’est en effet plus question du retour des clients en magasin.
- Une logique relationnelle entre la marque et le consommateur qui évolue : le consommateur veut désormais une relation de plus en plus proche avec la marque à condition que ce soit basée sur l’utilité absolue de la marque, sa raison d’être.
- Un retour à l’essentiel : le consommateur ressort de la crise plus fort mais avec une montée du stress et des angoisses sur l’avenir. Il faut une empathie des marques, une logique de réassurance face à cette crise sanitaire financière et économique.
Nos conseils pour répondre efficacement à ces impacts
- Travailler son utilité, sa raison d’être, en quoi peut-on être utile à ses consommateurs. Pour Nicolas André, « L’utilité va être au cœur du nouveau contrat relationnel entre la marque et les consommateurs ».
- La relation client doit être la plus fluide et la plus simple possible.
- Il ne faut pas oublier de communiquer sur les fondamentaux et d’être très concret et tangible (les prix, les réductions …)
- Il faut éviter de succomber à une trop grande posture empathique des marques qui créeraient un sentiment de récupération.
« L’après COVID-19 va provoquer une accélération de la personnalisation de la relation client. L’utilité de la marque sera également la base du nouveau contrat relationnel entre la marque et ses publics. »
Il faut aussi comprendre que la crise a été vécue individuellement. Si avant la crise la personnalisation était mal vue elle apparait désormais comme une solution viable. Le consommateur attend des marques une réponse personnalisée à ses problèmes.
Autre point critique à prendre en compte les consommateurs ne souhaitent pas forcément revenir à un bombardement marketing « comme avant » cette crise. Il faut peut-être minorer les fréquences d’adressage et mieux les doser. Le bon moment et la bonne fréquence vont être bien évidemment d’autant plus importants.
Les erreurs à ne pas commettre ?
- Essayer de tout de suite utiliser cette relation, de l’exploiter. Le piège est de casser la nouvelle dynamique entre marque et consommateurs par un recourt immédiat à d’anciennes recettes promotionnelles.
- S’affranchir de la réflexion autour de l’utilité de la marque, et ne pas la travailler.
- Ne pas réinvestir les canaux digitaux.
- Laisser tomber l’écoute client : on ne sait pas encore ce que l’avenir nous réserve et l’insight doit être présent en permanence.
Leader en France du datamarketing, EPSILON propose d’exploiter les bénéfices de la data pour vous accompagner à mieux réagir à cette crise. N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez avoir plus d’information.